LA PREMIÈRE PIERRE

Lisez, vous mes amis,
Lisez ces quelques lignes.
Que vous soyez ou non au bagne
Qu'elles vous redonnent une once de vie.

Je ne sais que penser le soir
Quand, après une journée
Que j'ai encore passée à rêver éveillé,
Je rentre seul et qu'il fait si noir.

Ou plutôt si, je sais :
Pourquoi les ténèbres me paraissent elles si profondes?
Pourquoi suis je condamné à être plus qu'une simple onde
Qui traverserait, inaperçue, le monde avec volupté?

J'aimerais tant que tout cela,
Cette vie, cette pathétique routine,
Enfin cessent, retirant de ma chair cette épine
Pour qu'enfin mon visage puisse retrouver son éclat.

Mais qu'attends-je si impatiemment?
Mais la révélation bien entendu!
J'attends qu'au détour d'un chêne vermoulu
Mon regard croise celui d'une nymphe, une dryade, tout simplement.

Et quand, malgré mes chagrins,
je peux me laisser prendre aux douceurs du sommeil,
ce n'est jamais qu'un sursis car je sais que, dès le réveil,
il me faudra quitter le havre de paix que constituent mes coussins.

Alors tout recommence, l'enfer reprend sa place
Et les divinités toutes la journée viennent me tenter :
"Que fais tu là pauvre fou? A quoi bon lutter?
Va donc plutôt trouver Anubis, qu'il mette ton cœur sur la balance.

Parfois, quand tout est trop insipide,
Je voudrais crier : "Anubis, me voici!
De toutes façons, que me reste-t-il ici
Si ce ne sont quelques images du passé qui défilent dans des visions fugitives?"

Mon seul espoir aujourd'hui
Est de trouver celle qui me redonnera la vie.
Et si pour cela je dois escalader l'Olympe pour mendier auprès des Dieux,
Toi mon ami, crois bien que je le ferai, pour qu'enfin la lumière habite mes yeux.

Hélas! Je suis encore si loin du but,
Si esseulé dans ce monde de brutes!
Où trouverai-je le courage de lutter un jour de plus?
Mais en vous bien sûr, vous qui m'apportez plus que je ne l'aurais cru!

Ainsi donc je vous quitte,
Mais n'ayez crainte, je vous reviendrez,
Et alors peut-être me trouverez-vous changé.
Alors nous formerons un groupe riche car hétéroclite.

(Jérôme LAMARQUE - 20 décembre 2000)